Nous le mentionnions déjà lors des élections de mai (ici), l’immigration
indispensable à l’économie singapourienne provoque un ressentiment croissant (et
compréhensible) au sein de la population autochtone qui se considère envahie
(1.9 millions d’étrangers pour 3.3 millions de singapouriens) et spoliée («ils
prennent nos emplois et nos maisons»*).
La nombreuse population chinoise (de Chine continentale) attire
l’essentiel de ce courroux. Attirés par la sécurité, le confort et les
opportunités de la «Suisse d’Asie», ses rentiers et ses investisseurs ne
passent pas inaperçus dans les lieux chics et branchés de la ville.
L’un d’eux vient de relancer la polémique à la suite d’un accident
dramatique. Brûlant un feu rouge à grande vitesse au volant de sa Ferrari au
milieu de la nuit, il a provoqué la mort de deux personnes (et la sienne) en percutant un taxi et une moto (les images effrayantes
de la caméra embarquée d’un autre taxi circulent sur le web). Pour asseoir
l’horreur du récit, il revenait de soirée, accompagné d’une «étudiante» (chinoise
aussi) de 20 ans, pendant que son épouse enceinte l’attendait à la maison. Ce
drame survient quelques mois après l’accident mortel provoqué à l’aéroport par
un voyageur chinois qui s’était emparé du taxi qu’il occupait.
Consciente de la colère naissante, l’ambassade de Chine à Singapour a,
cette fois, jugé l’impact suffisamment grave pour se fendre d’un communiqué à
ses ressortissants et de condoléances à la nation singapourienne.
Il nous reste à espérer que les effets dramatiques de ces accidents isolés
n’affecteront pas (trop) les qualités admirables d’intégration et de tolérance
qui ont contribué à la success story
de Singapour.
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In a rare move, the Chinese Embassy has issued a letter telling its citizens living in Singapore to be conscious of their conduct and to abide by the laws here |
* Les singapouriens se plaignent beaucoup de la hausse
du prix de l’immobilier provoquée, entre autres, par les nombreuses acquisitions
“flight to safety” par des étrangers fortunés de la région (essentiellement
dans le haut du marché donc). Même si la complainte semble illogique (la hausse
enrichit les 80% -oui, 80%- de la population qui sont propriétaires), le
gouvernement a réagi par l’instauration d’une taxe de 10% sur les achats
immobiliers par des étrangers. Il entreprend aussi de (doucement) juguler l'importation
de main d’œuvre et de talents en resserrant progressivement l’octroi de (certains)
permis de travail.